Égalité des chances : modèles de femmes dirigeantes dans l'environnement économique franco-allemand. 

07/03/2023

Entretien avec Corinne Mandin, Présidente de Lanxess en France

Madame Mandin, vous êtes une femme qui a fait carrière dans une entreprise internationale. Pourriez-vous nous décrire votre parcours ?

Mon parcours est singulier surtout pour la France. J’ai débuté ma carrière avec un BTS de secrétariat trilingue en poche et dirige aujourd’hui une entreprise. 
J’ai rejoint le groupe en 1990 en tant qu’assistante commerciale. Après quelques années, mon ambition d’aller sur le terrain à la rencontre des clients s’est confirmée. Depuis toujours, j’étais passionnée par la vente. Finalement, après 9 ans de bons et loyaux services, j’ai obtenu un poste de commerciale. En 2003, j’ai été mutée en Allemagne au Marketing. De retour en France, j’ai pris la Direction des ventes France de résines échangeuses d’ions en 2006. En 2012, j’ai été nommée Directrice des Ventes Europe de l’Ouest puis Directrice des Ventes de la région EMEA. En 2021, on m’a confié la Direction Générale des entités françaises de Lanxess. 
 
Sur quoi vous concentrez-vous aujourd’hui dans votre travail ?

Mon rôle est extrêmement varié mais je le résumerais en deux axes principaux : 
Le premier :  la promotion de Lanxess, faire connaître notre entreprise et nos activités en France. Mais aussi la promotion de Lanxess France à l’intérieur du Groupe. Cela consiste à mettre en valeur les talents français et les positionner pour une carrière internationale au sein du Groupe. Il s’agit également de promouvoir la créativité et la tech françaises !

Le second : l’intégration des nouveaux collègues et l’animation d’une équipe française. En effet, Lanxess a fait l’acquisition en seulement 2 ans de 4 entreprises (Intace, Theseo, Microbiol Control et Emerald Kalama Chemical). Mon rôle est d’accompagner ces nouveaux collaborateurs qui n’ont pour la plupart jamais travaillé dans un groupe allemand et découvrent les différences interculturelles. 

Quelles sont les réalisations de votre carrière professionnelle dont vous êtes particulièrement fière ? Quelles ont été les étapes difficiles ? 

Mon ambition, c’était le commerce international. Je n’ai jamais visé un poste de manager et encore moins la direction d’une entreprise. Ce sont certains de mes responsables qui ont cru -  avant moi - en mes capacités à diriger une équipe internationale. Je suis fière d’avoir accepté de dépasser mes propres limites et d’avoir saisi ces opportunités car j’ai découvert combien un rôle de leader peut être passionnant. L’étape la plus compliquée – en début de carrière - a été de prouver qu’en dépit d’un diplôme non orienté business et de la complexité technique  des produits de ma Business Unit - je pouvais être compétente à un poste de commerciale.  La France est un pays élitiste qui ne donne guère de chances à celles et ceux non issus d’une Grande Ecole. En Allemagne, l’expérience et les compétences sont plus valorisées ce qui m’a permis finalement d’obtenir le soutien escompté. 

Le secteur de la chimie en particulier est très masculin. Quelles compétences une femme doit-elle posséder pour occuper un poste de haut niveau ?

Je n’ai jamais ressenti le fait d’être une femme comme un inconvénient. Au contraire, je considère que les qualités féminines sont un atout pour une carrière à condition bien sûr d’avoir du tempérament et les compétences professionnelles requises pour le poste. J’ai toujours été intégrée dans des équipes masculines avec respect et sentiment d’équité. Je constate même que beaucoup d’hommes sont extrêmement bienveillants vis-à-vis de l’évolution des femmes au sein des entreprises, voire même plus que les femmes entre elles.
Néanmoins je pense qu’il est avéré qu’une femme doit souvent faire preuve de plus d’engagement et déployer plus d’efforts qu’un homme pour prétendre à la même évolution de carrière.  Une grande ténacité est un atout de réussite !

Comment faire pour que davantage de femmes occupent des postes de direction ? Quelles mesures seraient bénéfiques ? 

Au début, j’étais plutôt contre les quotas. Je considérais comme dévalorisant qu’une femme puisse être nommée sur la base d’une obligation légale. Mais je dois reconnaître que le récent exemple allemand m’a fait changer d’avis. Pour certains postes, les quotas représentent un accélérateur et une véritable opportunité pour les femmes d’accéder à des postes de haut niveau.
Je reste cependant convaincue que le principal frein au développement de carrière des femmes vient d’elles-mêmes. Il existe bien sûr des cas où les femmes ont de telles contraintes familiales qu’elles ne peuvent pas s’investir dans une carrière professionnelle. Mais trop souvent les femmes craignent de ne pas être à la hauteur. C’est un profond changement culturel qui doit commencer dès l’école. Le Groupe Lanxess a lancé la WinX (Woman Initiative Lanxess) pour aider les femmes à développer la confiance en soi, à élargir leur réseau professionnel et à chasser le « Syndrome de l’imposteur ».

Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes femmes qui veulent faire carrière ?

Fuir les personnes négatives qui essaient de vous démontrer que vous ne pourrez pas réussir ! J’en ai croisé sur mon chemin et je me félicite de ne pas avoir écouté leur prédiction que mon diplôme de secrétariat scellerait à jamais ma position dans le marbre. En revanche, faire confiance à ceux qui croient en vous et vous proposent des opportunités de développement car ils ont souvent perçu en vous des qualités que vous ignorez !